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Réserves de substitution Stocker l’eau pour sécuriser les fourrages

Âgés de moins de 30 ans, Florian Bouchery (à g.), sa sœur Juliette (absente le jour du reportage) et son cousin Alix représentent la nouvelle génération du Gaec. © M. Guillemaud

Les étés sont marqués par les restrictions d’irrigation. Au point que le quota de 60 000 m3 d’eau du Gaec l’Éole est rarement utilisé. Le salut devrait venir des réserves de substitution.

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Ils sont six, trois de deux générations : Florian Bouchery, installé en 2017, son père Didier, sa mère Marie-Christelle, son oncle Fabrice, Juliette sa sœur et Alix son cousin. Ces deux derniers sont venus en juin renforcer le Gaec l’Éole, qui emploie aussi un ouvrier à temps plein. L’exploitation de Priaires (Deux-Sèvres) s’étend sur 435 ha, dont 288 de cultures de vente, blé, orge, tournesol, pois et maïs, dans une région où les céréales sont reines. Elle abrite 130 laitières auxquelles sont dédiées 115 ha de cultures fourragères réparties en prairies­, luzerne, sorgho et maïs ensilage irrigué ou produit dans des parcelles aux sols profonds qui inondent en hiver. Ici comme dans beaucoup d’exploitations de Poitou-Charentes, le problème est celui de l’eau. « Nous sommes sur des petites groies, souligne Florian, des terres très séchantes qui ne retiennent pas l’eau. »

Luzerne et sorgo irrigués

Les dernières années ont été difficiles. En 2019, la quantité de maïs ensilage n’a pas suffi à l’affouragement du troupeau. « Nous avons dû ramasser aussi tous les maïs non irrigués, mais il n’y avait rien dedans, se souvient-il. Il a même fallu acheter du maïs grain à l’extérieur pour compléter la ration. » Pourtant, l’exploitation dispose d’un quota d’eau de 60 000 m3, « mais avec les restrictions qui tombent chaque année, nous n’utilisons jamais la totalité ». Jusqu’à présent, ce volume était fourni par un forage et ne permettait d’irriguer qu’une trentaine d’hectares, ceux dédiés au maïs fourrage. En 2022, la donne devrait changer avec l’aménagement prévu, dès l’été prochain, d’une réserve de substitution. Cette eau stockée l’hiver pour arroser l’été permettra de sécuriser le maïs, mais pas seulement. « Nous pourrons irriguer davantage de surfaces et donc d’autres cultures, notamment la luzerne et le sorgho », indique Florian.

La réserve de substitution permettra d’assurer le maïs ensilage nécessaire au cheptel et d’arroser luzerne et sorgho pour gagner en autonomie alimentaire. © M. Guillemaud

La bataille pour ces réserves de substitution a été longue. Et elle n’est pas finie puisqu’un recours est toujours en suspens concernant l’AUP, l’autorisation unique de prélèvement. Les négociations ont démarré il y a onze ans et se sont vite transformées en pugilat entre irrigants et protecteurs de l’environnement. Pour apaiser les tensions, la préfète des Deux-Sèvres a forcé tout le monde à s’écouter et à s’entendre. La reprise du dialogue a permis de signer un protocole d’accord en 2018.

Engagements en retour

En contrepartie, les agriculteurs ont dû prendre des engagements sur la biodiversité et le changement de leurs pratiques. Cela commence par un diagnostic de la chambre d’agriculture concernant l’assolement de l’exploitation, l’indice de fréquence de traitement (IFT), etc. Une fois celui-ci établi, l’agriculteur s’engage sur des améliorations : plantation de haies, conversion au bio, réduction d’intrants… Le Gaec, qui pratique l’agriculture raisonnée, a déjà réduit son IFT et produit des protéines végétales avec la luzerne. Florian prévoit encore d’allonger la rotation et d’implanter des cultures mellifères.

Quant à l’utilisation de l’eau, il indique : « Nous allons davantage raisonner notre surface fourragère. On irriguera un peu moins de maïs et on fera un ou deux passages sur la luzerne et un sur le sorgho, qui manque d’eau en août. Pour la luzerne, on aura quatre coupes au lieu de deux. Alors qu’elle donne 15 à 16 de MAT (matière azotée totale), voire seulement 14 les mauvaises années, là, nous serons entre 18 et 22. »

Le Gaec est né de la fusion de deux exploitations au début des années 2000. Le but était de mutualiser la mise aux normes, avec un nouveau bâtiment d’élevage réunissant deux troupeaux et la construction d’une salle de traite. Vingt ans après, celle-ci va être remplacée par un robot, afin d’alléger le travail (quatre personnes sont actuellement mobilisées pour la traite matin et soir).

Travailler à six donne un véritable confort de vie. Les membres du Gaec ne sont d’astreinte qu’un week-end sur trois. Tous apprécient leurs 24 jours de vacances par an, pas question de perdre ces avantages et d’augmenter la taille du cheptel avec l’arrivée du robot. Le but est de ne pas dépasser 140 vaches. « Nous devons être cohérents et ne pas devenir une usine à lait. » 

Myriam Guillemaud

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